mardi 28 juin 2016

L’islam bride la science

Les pays arabes représentent moins d’1% des dépenses mondiales en R&D. En cause, les politiques autoritaires et les interdits religieux.




GITEX


Créé en 2012 par Hamzeh al-Fuqha, un Palestinien vivant aux Emirats arabes unis, SmartAd est un logiciel qui fait appel à la reconnaissance faciale pour comprendre comment les clients réagissent aux publicités. Le programme, utilisé entre autres par Burger King, peut également déterminer l’âge et le sexe du consommateur. C’est un des rares exemples d’innovations en provenance du monde arabe. Selon l’Unesco, les pays arabes (5,9 % du PIB mondial) représentent moins d’1% du total des dépenses en recherche et développement (R&D).

Le Bahreïn y consacre 0,04 % de son PIB, l’Egypte 0,7%, contre 0,8% en Inde et 1,6 % au Royaume-Uni. Et encore, la plus grosse partie des sommes est gaspillée. En Egypte, les professeurs sont promus en fonction de qui ils connaissent et non selon ce qu’ils découvrent.

Le gros problème cependant est la timidité du secteur privé en matière de R&D. Les entreprises chinoises dépensent près de quatre fois plus dans ce domaine que leur gouvernement, et les américaines plus de deux fois et demie. Quant aux firmes israéliennes, elles représentent au moins 75 % des dépenses nationales en R&D.

Dans le monde arabe, en revanche, cette contribution du secteur privé est inférieure à 5 %. Le problème, selon l’influente scientifique jordanienne Rana Dajani, est dû à « l’absence d’un environnement encourageant la pensée libre et l’exploration ». Les écoles encouragent l’apprentissage du par cœur, et les dirigeants répriment tout débat politique. De nombreux domaines de recherche sont entravés non seulement par des politiques répressives, mais aussi par ce qui est perçu comme une contradiction entre islam et science. La médecine, par exemple, peut donner lieu à controverse, notamment dans la recherche sur les embryons. Pourtant, de tels obstacles ne sont pas insurmontables. 

Après avoir passé des années à consulter des scientifiques et des théologiens, la Jordanie a adopté en 2014 une loi autorisant la recherche sur les cellules souches. Une clause précise que les embryons ne pourront être créés qu’à partir du sperme et des ovules de couples mariés.

Incubateurs marocains

D’autres pays progressent également dans d’autres secteurs. Les pépinières d’entreprises et incubateurs marocains ont contribué à faire du pays le premier exportateur de logiciels et produits high-tech du monde arabe. Et des innovateurs privés n’hésitent pas à créer des start-up, même si cela concerne des niches comme la vente en ligne ou la mise au point de versions arabes d’applications développées ailleurs. Careem, par exemple, est la version saoudienne de l’américain Uber. Rana Dajani remarque que les scientifiques et innovateurs arabes réussissent bien mieux à l’étranger que chez eux (Steve Jobs, par exemple, était à moitié syrien). Pour encourager la créativité, le Moyen-Orient doit mieux accepter la pensée critique. Une telle liberté est d’ailleurs susceptible d’avoir bien d’autres avantages.


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